Dans cette série d’articles, Cédric Lizotte visite certains des meilleurs restaurants d’Europe. De la France à la Suisse en passant par la République tchèque, voici les bonnes adresses pour goûter les délices de certains des meilleurs chefs de la planète. Suivez-le grâce au mot-clic #CedricEnEurope.
BERLIN, Allemagne – Certains disent que le travail de Paco Perez est peut-être ce qui se rapproche le plus de ce qu’était El Bulli.
Chef Paco Perez n’est peut-être pas aussi connu que ses mentors, les frères Adria et Michel Guérard, mais son CV est tout de même stupéfiant: un total de cinq étoiles Michelin, plusieurs années à El Bulli, six restaurants, et une certaine aura qui rend ses fans dévoués. Et pour cause.
Le repas à Cinco est un festin de 19 plats. L’accord mets-vin, lui aussi, est surdimensionné. La salle à manger est décorée d’une imposante structure de casseroles de cuivre mises en évidence par plusieurs luminaires, une œuvre de Tom Dixon.
Cinco, c’est aussi le restaurant du superbe hôtel Das Stue, aux abords du luxuriant parc Tiergarten dans la capitale allemande.
Cinco Paco Perez: Durant presque six heures!
Manger au resto Cinco, c’est toute une aventure. Du début à la fin, en comptant les poignées de main et l’apéro, cette aventure a duré presque six heures! Il faut donc s’assurer d’avoir tout le temps voulu pour apprécier cette expérience à sa juste valeur.
Avec la quantité de détails, de travail, de plats, de vins, de techniques, d’ingrédients que comprend une telle session de haute voltige gastronomique de plusieurs heures telle ce qu’on trouve chez Chef Perez, il est impossible de décrire chacun d’entre eux ici. Voici donc mes moments préférés.
Cinco Paco Perez: apéro, amuse-bouche, entrées
Comme apéro, on me surprend: une bière de brasserie artisanale de Munich! Une ale nommée Crew Republic Munich Easy. Agrumes, fruits exotiques, floral. Pas mal!
Les amuse-bouche sont nommées « cronut », « bangkok » et « consommé thai ». Le consommé est très salé, a des notes de fusion espagnol/asiatique, offre des notes fumées, umami. Ça réveille les sens! Le cronut n’a rien à voir avec la pâtisserie du même nom et goûte plutôt à tarte à la citrouille – croustillant/léger/gras/super sucré (improbable!) Et je dois avouer que je n’ai aucune idée de ce qu’est « bangkok » – c’est vert, et ça goûte les Rice Krispies congelés avec du concombre. Le ton est donné…
Le premier groupe de plats se nomme « le jardin ». Une bouchée qui combine ail, gingembre, pois, patate et piment piquillo… et je n’ai aucune idée quoi en penser, outre » patates pilées, gelée, terre ». Désolé de ne pas être plus explicite, mon palais est surpris! Puis, un deuxième plat qui se nomme « carotte ». Le troisième plat du « jardin » combine « chou-fleur et haricot ». Ces plats sont servis sur une assiette brune qui rappelle les sillons d’un jardin. Quelques feuilles, quelques fleurs comestibles… et une « terre » qui goûte les Oreos salés! Impressionnant, surprenant!
Ces petites bouchées sont évidemment excitantes et amusantes, mais j’ai rapidement compris que le repas n’était pas encore commencé!
Cinco Paco Perez: Les faits-saillants
Le premier vin servi pour la portion « fruits de mer » du repas: Eigenart, Max Müller I (silvaner). Celui-ci est extrêmement subtil, tout comme la majorité des plats servis ce soir.
Mon plat favori du début de repas est représentatif du passé de chef Perez. Dans un consommé extrêmement collant et riche – tout plein de collagène – se trouvent trois petites « fèves ». Celles-ci ont évidemment été créées à partir d’un second liquide, puis formées en sphères. Il s’agit probablement de la classique technique de sphérification si populaire en cuisine moléculaire. Le plat est délicat, délicieux, les saveurs explosent une fois en bouche… mais la subtilité est au rendez-vous, puisque l’assaisonnement est gardé au minimum. Superbe!
Comme deuxième vin: Les Truffeaux, Montlouis sur Loire, par François Chidaine, 2010 (chenin blanc). Ce vin est exceptionnel. On croirait boire des fleurs! C’est léger, subtil, délicat…
Entre autres plats servis dans cette séquence, la présentation du plat de crevette est originale et raffinée. Deux petites crevettes, des pousses basilic thaï, et juste assez d’épices pour déceler les ingrédients d’un tom yam… sans les piments!
Ensuite, un troisième vin. Venta d’Aubert, Bajo Aragon, 2013 (grenache).
Mon plat favori de cette séquence est le thon escabeche. C’est une version extrêmement fancy d’une sardine escabeche: du thon de qualité sushi avec un aspic translucide de vinaigre. Le Japon rencontre l’Espagne, en direct de Berlin!
Puis, un peu plus tard, une autre superbe exécution: l' »œuf bénédictine ». La version de chef Perez est pour les fans des œufs mollets – presque crus – et le jamon iberico! Est-ce le plat le plus riche de tous les temps? Heureusement, cette combinaison décadente n’est pas trop salée, ce qui lui permet de s’agencer remarquablement avec le vin.
Immédiatement après, le serveur me suggère de « faire mon propre risotto ». Ça semble être simple: du riz, un œuf poché, il faut mélanger. Mais, surprise! L’œuf est en fait une sphère de liquide qui goûte le parmesan. Le riz est parfaitement al dente. Superbe, et si hipster!
Le quatrième vin de la soirée est un Günther Steinmetz, Graacher Himmelreich, 2008 (pinot noir). Sec, agréable, sans plus.
Le plat suivant est un plat de « pigeon ». Et le look est celui d’une poitrine de pigeon crue! Surprise, il ne s’agit pas de viande… est-ce de la betterave?
Avec les desserts, un dernier vin: Winninger Uhlen Ausele, Mosel-Saar-Ruwer, par Reinhard & Beate Knebel, 2005 (riesling). Très doux, intense, sucré… superbe.
Puis, pour dessert, le plat le plus amusant était celui du « hot dolc ». C’est un hot dog de chocolat blanc! Les condiments sont des confitures! Si gadget, mais si agréable tout de même!
Puis, après quelques autres desserts délicieux, trois dernières bouchées: un nez et une bouche, parce que Cinco touche les cinq sens. Bravo!
Cinco Paco Perez: Conclusion
Il m’est un peu difficile d’expliquer exactement comment je me sens suite à ce repas. Il s’agit évidemment d’une expérience de luxe qui sort de l’ordinaire. Mais un tel repas ne se prend pas à la légère. Je crois que les gens qui ne sont pas prêts mentalement à une telle expérience ne peuvent l’apprécier à sa juste valeur. Il faut être un peu geek de gastronomie pour tripper à fond!
Cinco Paco Perez
Hotel Das Stue
Réservations sur Open Table: cliquez ici
Drakestraße 1, 10787 Berlin Allemagne
+49 30 311 722-0
5@das-stue.com